Écrivain célèbre et auteur de tous les textes
interprétés par MadrigalJam.

« Ne méprisez la sensibilité de personne. La sensibilité de chacun, c’est son génie.»
Charles Baudelaire


La vie de Baudelaire est relativement connue mais il convient ici d’en rappeler les grandes lignes.
Le poète naît à Paris le 9 avril 1821. Sa mère, Caroline Dufayis, est âgée de vingt-sept ans alors que son père, Joseph-François, artiste et esthète, fidèle à l’esprit des Encyclopédistes du 18ème siècle, est sexagénaire. Son père meurt et il n’a que six ans. Sa mère épousera Jacques Aupick, militaire de profession, un an plus tard. Le remariage de sa mère sera une catastrophe pour Charles. Toute sa vie adulte, il aura le sentiment que son beau-père lui vole l’affection de sa mère. En 1836, Baudelaire est pensionnaire au Collège Louis-le-Grand à Paris, collège d’où il sera expulsé, trois ans plus tard, en 1839, suite à sa contestation de l’autorité d’un professeur pour protéger l’un de ses camarades de classe. Baudelaire s’affiche déjà en rupture avec les valeurs bourgeoises et conservatrices de son époque. Sa famille l’envoie en voyage mais dès son retour à Paris, il commence à mener une vie de bohême, compose ses premiers poèmes et rencontre Jeanne Duval, jeune comédienne mulâtre avec qui il entretiendra une relation tumultueuse toute sa vie, alternant entre la joie et l’amertume. Il commence à rédiger ses premiers articles : critique d’art et journaliste, il louange le peintre Eugène Delacroix, ce lac de sang hanté de mauvais anges et encense, contre l’opinion générale de l’époque, le romancier Balzac en qui il voit un visionnaire passionné. Il est littéralement renversé lorsqu’il entend la musique de Richard Wagner. Toute sa vie, Baudelaire aura fréquenté les écrivains et les peintres, lu les philosophes et les théologiens mais aussi vagabondé avec les prostituées et les éclopés de Paris. Sa plume est intarissable : ses Curiosités Esthétiques le démontrent amplement par la diversité de ses articles et l’étendue des sujets abordés. Sa curiosité esthétique est celle d’un titan. En juin 1857, il publie son premier recueil qui contient la quasi-totalité de ses poèmes : Les Fleurs du mal, édité par Auguste Poulet-Malassis -surnommé Coco mal perché- et tiré à 1 100 exemplaires. Dédié à Théophile Gautier, le recueil sera condamné pour outrage à la morale publique et religieuse. Nous sommes bien sous le Second Empire de Louis-Napoléon Bonaparte.
L’auteur et l’éditeur sont condamnés à verser une amende. En 1861, le recueil sera réédité, enrichi de 32 nouveaux poèmes mais amputé des six poèmes visés par le parquet. Le thème de la femme est largement évoqué dans ces Fleurs du Mal ; Jeanne Duval, Marie Daubrun ainsi qu’Apollonie Sabatier dite La Présidente en sont les trois figures centrales. C’est d’ailleurs à Mme Sabatier dont Clesinger a fait un buste admirable, que s’adressait le poète lorsqu’il composa le poème suivant, poème condamné et réhabilité par l’État français qu’en 1949 : À celle qui est trop gaie. En 1864, Baudelaire fuit la France et part pour Bruxelles, pourchassé par ses créanciers. Dans cette Pauvre Belgique, en visite dans une église de Namur en compagnie de son ami Félicien Rops, il s’écroule, atteint de troubles cérébraux. Il en perd la voix sauf pour maugréer un Crénom. Il retourne à Paris en 1867 pour y mourir à la fin du mois d’août avant de pouvoir, selon son souhait, réaliser une autre édition de ses Fleurs du Mal. Il sera enterré au cimetière du Montparnasse avec sa mère et son beau-père. Baudelaire : un point de départ, un modèle. Charles Baudelaire est le premier grand poète, et le poète par excellence, de la modernité poétique. En rupture avec l’esthétique classique malgré sa versification en sonnets et en soustrayant l’art à la morale, Baudelaire sera le grand génie à la perfection unique de l’entrée dans le champ poétique de tout ce que la vie rejette : ivrognerie et bizarreries, angoisses et terreurs, démons et vampires, révoltes et laideurs, spiritualités et rêveries ; la poésie moderne, désormais, transforme, comme écrit le poète, la boue en or. Il confronte et affronte les biens-pensants de son vivant, il en a payé le prix comme plusieurs ; de surcroît, il s’attaque au Temps et à l’Ennui, à la Mort et à l’Hypocrisie, ce qui n’est pas une mince tâche, tant dans la vie quotidienne qu’en poésie. Par ailleurs, dans le champ pictural, de simples paysans deviennent nobles sujets sous le pinceau de Courbet et Manet peint une femme nue avec des hommes habillés tout en déjeunant sur l’herbe. Et Baudelaire de faire un sujet poétique le drame d’un fils qui se pend et dont la mère vend la corde pour s’enrichir. Et après Baudelaire viendront Rimbaud et Lautréamont. Mallarmé et Apollinaire. Breton et tous les autres. Breton qui soulignait justement que si Rimbaud et Lautréamont sont surréalistes dans la révolte, Baudelaire est surréaliste dans la morale. Enfin! voulait-il inscrire comme épitaphe sur sa pierre tombale. Baudelaire voulait quitter sa vie en mort ... joyeux.
Merci à Gérard Blais pour ce précieux résumé.
